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Hauts-de-France : les sous-traitants du ferroviaire poussés à plus de performance

www.leschos.fr– 19/10/2021 – Nicole Buyse

Depuis deux ans, les constructeurs du ferroviaire, Alstom en tête, et les entreprises sous-traitantes cherchent à mieux travailler ensemble. Le dispositif consiste à regrouper des PME sur un projet précis tout en les accompagnant pour améliorer leur performance industrielle. Devant le succès, l’initiative va essaimer dans toute la France avec dix-huit grappes prévues d’ici à trois ans.

Délais de livraison trop longs, défauts de qualité sur certaines pièces, manque de fluidité dans le passage de commandes… Les Hauts-de-France, qui concentrent le plus grand nombre d’acteurs dans la filière ferroviaire, avec 40 % de la production française, ont décidé d’améliorer les relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants. Pour y parvenir, rien de mieux que de regrouper les entreprises entre elles, de les faire travailler en réseau sur un projet précis, au sein de grappes – sorte de clusters ponctuels – inspiré de ce qui s’est créé dans l’aéronautique.

C’est le succès de Space Aéro, qui a impliqué jusqu’à 900 entreprises dans 120 grappes, qui a poussé la filière ferroviaire à lancer en 2019 le dispositif Care pour « compétitivité accompagnement rail emploi ». Une première grappe de six PME, autour d’Alstom, a été créée. Une deuxième vient de voir le jour fin septembre, réunissant six autres PME toujours autour d’Alstom.

Diminution des retards

La première grappe, qui devait achever ses travaux en octobre 2020, a pris dix mois de retard en raison de la crise sanitaire. Le bilan vient d’être tiré. Grâce au dispositif, qui consiste en ​21 journées d’accompagnement par un expert indépendant dont quatorze dans chaque entreprise, les retards de livraison ont diminué de 60 % et le nombre de pièces non conformes de 33 %. Le programme a coûté 162.000 euros, financé à 22 % par les PME, 28 % par Alstom et Care et les 50 % restants par l’Etat et la région.

Tous les mois, un point était fait avec le constructeur sur l’avancement des projets. « Avec l’entreprise, nous commencions par faire le diagnostic, en toute confidentialité, et déterminions comment rendre le process plus efficace ou comment augmenter les cadences », détaille Gérard Cliquet, directeur opérationnel de Care.

Mieux planifier la production

Sur le terrain, les dirigeants de PME témoignent. Stratiforme, à Bersée, près de Douai, fabricant de pièces composites, a amélioré la chaîne logistique. « Nous avons créé un outil informatique maison pour mieux prévoir la planification de la production en fonction de notre charge capacitaire », rapporte Guy Leblon, son président, qui a recruté une personne dédiée et va poursuivre avec un changement d’ERP l’année prochaine.

Pour François-Xavier Jette, PDG de Mecajet, société de construction mécanique et mécano soudure, basée à Ligny-en-Cambrésis, cet accompagnement a été un « accélérateur de prise de conscience » pour mieux saisir les enjeux des constructeurs, leurs attentes et celles du marché. Il a investi 2 millions d’euros dans des moyens d’usinage, de découpe laser et une nouvelle cabine de peinture, afin de monter en gamme et produire de plus grosses pièces. « Sans Care nous l’aurions sans doute fait, mais plus tard », confie le dirigeant. « Cela va nous permettre de répondre à des appels d’offres pas uniquement dans le ferroviaire, mais aussi dans la sidérurgie ou le nucléaire. »

MSM Europeinture, à Raismes, près de Valenciennes, a mis en place des indicateurs de performance sur la sécurité, la qualité, les délais et le personnel, partageant ces tableaux avec les salariés. « Cela a insufflé de la transparence et le personnel s’est senti beaucoup plus impliqué », commente Dominique Delille, directeur de l’usine.

La filière ferroviaire compte bien profiter de cette initiative des Hauts-de-France. Ce territoire concentre 15.000 des 21.000 emplois du secteur (hors emplois industriels de la SNCF). Autour des trois constructeurs – Alstom (3.370 personnes), Millet, fabricant de wagons de marchandises à Douai et Siemens, gravitent plus de 250 entreprises environ dont une dizaine d’équipementiers de rang 1.

Des projets de grappes sont en gestation en Auvergne-Rhône-Alpes, Pays de Loire, Centre-Val de Loire ou encore Bourgogne-Franche-Comté. « D’ici à trois ans, on devrait compter 18 nouvelles grappes en France », annonce Jérôme Duchange, secrétaire général de Care.

Nicole Buyse